Épisode 1 : Présentation du Projet PARR
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Épisode 1 : Présentation du Projet PARR

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Fella Hadj Kaddour (FHK) : Bonjour à toutes et à tous, et bienvenue dans le podcast « En fleurs, plus en feu ». Je suis Fella Hadj Kaddour et je serai votre hôte pour l’épisode d’aujourd’hui. « En fleurs, plus en feu », est un podcast qui a pour objectif de mettre en visibilité le travail du projet de Promotion des Actrices Racisées en recherche partenariale au Québec, le projet PARR. Et maintenant, l’épisode d’aujourd’hui.

**musique**

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FHK : Avant de commencer le podcast, j’aimerais d’abord qu’on reconnaisse qu’on se réunit aujourd’hui sur le territoire de la nation Kanien:keha'ka,territoire non-cédé de Tiohtià:ke, ici sur l’île de la tortue. Nous aimerons, pardon, aimerions, exprimer toute notre solidarité avec les communautés autochtones qui luttent pour l’auto-détermination, nous honorons bien sûr les gardiens et les gardiennes traditionel·le·s de ce territoire. « En fleurs, plus en feu », est un projet qui a comme objectif de mettre en visibilité le travail du projet de Promotion des Actrices Racisées dans la recherche partenariale au Québec, donc le projet PARR. Et donc, ce projet part d’un constat, celui que la production de la connaissance sur et par les femmes et les personnes non-binaires noires, autochtones et racisées est invisibilisée et sous-représentée, et donc l’objectif du projet c’est vraiment de comprendre quels sont ces obstacles et de mettre en place des stratégies de résistance, qu’elles soient individuelles, collectives, mais aussi de créer des espaces d’épanouissement personnel et de soin de soi.

Avant de rentrer dans le vif du sujet, j’aimerais qu’on commence par des enjeux de définition. Quand on parle de femmes et personnes non-binaires racisées en recherche partenariale, d’abord, sur la question des personnes non-binaires. Une personne non-binaire ne définit pas son identité de genre dans les cadres binaires exclusifs définissant l’homme ou la femme, et je cite : « les personnes non-binaires peuvent se sentir comme ni hommes, ni femmes, comme les deux, ou comme toute combinaison des deux. La non-binarité inclut les identités en lien avec la fluidité des genres. Les personnes non-binaires peuvent s’identifier comme trans selon leur auto-identification ». Aussi, quand on parle de femmes ou de personnes non-binaires racisées, quand on fait référence à la racialisation ou la racisation, on parle du processus d’altérisation, des individus et des groupes, selon leur origine réelle ou supposée, et qui permet de les distinguer comme racialement différents. Concernant la recherche partenariale, ou la recherche en partenariat, ça implique des approches, des objectifs et des pratiques en sciences sociales. Donc la recherche partenariale implique aussi une multitude d’acteurs et d’actrices sociaux, ça peut être des leaders d’organisation, des militants et des militantes, des fonctionnaires d’État, des professions des métiers d’intervention sociale ou de la pédagogie, et donc dans l’objectif de se réapproprier les ressources universitaires pour mettre en place des recherches sur leurs préoccupations ou pratiques, finalement.

Aujourd’hui, on se retrouve pour notre premier épisode, où on va aborder la genèse du projet PARR, le projet de Promotion des Actrices Racisées en recherche partenariale, les défis auxquels ce projet répond, et toutes les étapes de la mise en œuvre. Donc pour cela, j’ai le plaisir d’être accompagnée de toute l’équipe du projet PARR. Donc d’abord avec nous, Félicia Ça, donc chercheuse au sein du projet, bonjour Félicia.

03:36
Félicia Ça (FC): Bonjour!

FHK : Aussi avec nous Saaz Taher, chercheuse aussi au sein du projet, bonjour Saaz.

Saaz Taher (ST): Bonjour Fella!

FHK: Maud Jean-Baptiste, coordinatrice du projet PARR, bonjour.

Maud Jean-Baptiste (MJB) : Bonjour.

FHK : *rires* et Ornella Tannous, pardon, coordinatrice d’événements et de la vie communautaire, bonjour Ornella!

Ornella Tannous (OT) : Bonjour Fella!

FHK : Nous accueillons aussi avec nous Alexandra Pierre, travailleuse communautaire et autrice et également la personne à l’origine de la conception du projet PARR. Ta présence ici était importante pour en parler, merci d’avoir accepté l’invitation.

Alexandra Pierre (AP) : Merci de m’avoir invité!

04:13
FHK : Alors sans plus tarder, on va commencer par les questions et entrer dans le vif du sujet. Je vais commencer par adresser ma première question à toi Alexandra, qui est l’initiatrice du projet. Pourquoi ce projet, est-ce que tu peux revenir sur les premières réflexions que tu as eu autour de ce projet ?

AP : Et bien ce projet-là est né à l’été 2021. À cette époque-là je travaillais à Relais-Femmes. Relais-Femmes était dans un processus d’intégrer, plus, de façon plus systématique on va dire, l’intersectionnalité à toutes ses pratiques, avec les défis que ça comporte, n’est-ce pas. Et, j’étais aussi en train de travailler sur plusieurs projets, comme souvent à Relais. Je travaillais sur un projet autour de la lutte contre le racisme dans un regroupement féministe, je travaillais aussi sur deux projets de recherche. Un autour de l’intersectionnalité, qu’est-ce que ça veut dire dans la pratique concrètement au Québec, et un autre sur la santé gynécologique et obstétrique des femmes noires au Québec. Et parmi tous ces projets, un des constats, c’est que tous ces enjeux-là concernaient directement des personnes racisées, les femmes racisées, les personnes non-binaires racisées aussi, mais il y avait très peu d’écrits, écrits universitaires ou autres par ailleurs, qui étaient mobilisés dans les différents projets auxquels je participais. Alors le constat c’était que, ça m’étonnerait beaucoup que les femmes et les personnes non-binaires racisées aient rien écrit, ou rien pensé là-dessus, mais clairement, ce n’est pas visible, ce n’est pas mobilisable, on ne sait pas où trouver ces références-là, ou c’est difficile de trouver ces références-là. Donc il y a l’aspect de bon, est-ce qu’on cherche comme on devrait chercher ? Il y avait cet aspect-là, mais il y avait clairement l’aspect de l’invisibilisation par-là, donc ça m’a donné l’idée de déposer ce projet, et comme pour souvent, dans les organismes communautaires, il y avait un appel à projet, puis on a donc cette réflexion-là qui était pas du tout aboutie, qui était en marche, plus un appel à projet ou est-ce qu’on peut avoir des sous. Donc, on a déposé un projet avec Relais-Femmes. Une de mes collègues avec qui je travaillais beaucoup, Josiane Maheu, a beaucoup contribué aussi, donc c’est un peu comme ça que c’est né de ces réflexions-là, dans les milieux à la fois communautaire et à la fois de recherche.

FHK : Ok donc, ça c’était pour la question de la réflexion autour du projet, donc les premières étapes c’était de répondre finalement à l’appel de projet, c’était quoi les autres étapes vraiment de mise en œuvre du projet ?


07:26
AP : Bien les premières étapes c’était de chercher des sous, évidemment. Ensuite, il y a eu toute une réflexion sur comment on recrute. Qui, comment on recrute. On a essayé dans le recrutement d’avoir des pratiques en cohérence avec le projet. On a mis aussi en place un comité, alors vous allez m’aider, je m’en rappelle plus, un comité aviseur, oui c’est ça. Un comité aviseur pour nous aider dans le processus de recrutement, mais aussi dans le processus d’affiner l’idéation du projet. Un comité composé de femmes, il n’y avait pas de personnes non-binaires, mais de femmes autant du milieu universitaire que du milieu communautaire, et qui étaient un peu sensibles à la question des injustices épistémiques et de la manière dont le savoir, les connaissances des personnes, des femmes racisées, des personnes non-binaires racisées, étaient accueillies autant dans le milieu communautaire que dans le milieu universitaire.

FHK : Merci Alexandra, on reviendra sur justement cette définition d’injustice épistémique pour les auditeurs et les auditrices. Je voulais revenir d’abord sur…le projet concerne aussi les expériences des femmes et des personnes non-binaires dans les milieux de recherche donc universitaires, mais aussi dans les milieux communautaires. C’est quoi les enjeux auxquels ces personnes font face dans chacun de ces milieux-là ? Est-ce que vous avez trouvé des points communs aussi, ou des différences en termes d’expériences ?

AP : Ben c’est-à-dire, le point de départ, c’était de dire que, elles étaient pas visibles, donc ces personnes-là étaient pas visibles, donc forcément il y avait un enjeu là, de cette non-visibilité là, particulièrement au Québec, les personnes racisées représentent 10% de la population. À Montréal, c’est presque 33% de la population, de visu, quand on regardait les textes, les interventions, les recherches qu’on pouvait trouver sur ces thématiques-là, et en recherche tout court, en recherche partenariale, on ne les voyait pas. Donc c’était un peu le départ; après pour la recherche, on a découvert plein d’autres choses...

FC : Oui puis même avant la recherche en fait, je me souviens que le printemps 2022, puis l’été 2022, on se posait ce genre de questions, donc qui on inclut dans cette recherche-là ? Les femmes racisées, les femmes noires, les personnes non-binaires ? Est-ce qu’on peut parler des personnes non-binaires ? Si nous-mêmes on n’est pas des personnes non-binaires ? C’était dans nos questionnements. Est-ce qu’on rentre là-dedans aussi les femmes autochtones, les personnes non-binaires autochtones ? Est-ce qu’on rentre les personnes qui font de la recherche, point, qui ne font pas juste de la recherche partenariale ? Donc il y a eu vraiment beaucoup de questionnements face à cela, justement pour, à quel point est-ce qu’après, qu’on met tous ces résultats-là, on peut faire des analyses pour comparer ces différents groupes de personnes là ? Parce que c’est des réalités différentes pour différentes racisations, ou différentes identités de genre, donc comment on fait à la fin pour comparer tout ça, si on inclut tous ces profils-là en fait. Donc ça été beaucoup dans les questionnements.

Par la suite, dans la recherche, dans la recherche puis après dans les autres événements que PARR a eu, donc les journées BIPOC, les journées cohortes, le forum, on a vu que l’échantillonnage qu’on a fait, donc les personnes non-binaires, racisées et les femmes racisées, il y avait beaucoup de réalités en commun, donc beaucoup de choses que Saaz et moi avons entendu dans des entrevues ou dans des focus groups, sont revenus dans les événements par la suite. Donc tsé, à ce moment-là, ça été comme une dernière validation des choix qui ont été faits au début. Par rapport aux défis qui sont vécus, Saaz je suppose que tu pourras compléter, mais ce qu’Alexandra a mentionné face à l’invisibilisation, la tokenisation, c’est revenu beaucoup, tant au milieu communautaire qu’au milieu académique. Donc...voilà, les problèmes aussi face au temps, donc on le sait, on vient de finir un projet de recherche, tu te fais un échéancier au début, et finalement il y a un milliard d’imprévus, mais en même temps ton argent, ton financement est pour un temps fixe, donc comment tu fais à travers tout ça pour rencontrer tous les deadlines et tout ce qui vient en fait. Puis dans les recherches partenariales il y a ce défi ajouté du fait que le milieu communautaire puis le milieu académique ont pas du tout le même genre de défis en termes de temps. Donc...d’où l’académique est peut-être un peu plus pressé de publier, le communautaire veut des résultats tangibles tout de suite pour faire face à différents défis qu’ils vivent dans leur quotidien.

12:36
ST : Oui tout à fait et je dirais dans la continuité de ce que vient de nous dire Félicia, c’est que aussi, l’une des différences majeures c’était la question des ressources, entre le milieu communautaire et universitaire. Ce qui ressort beaucoup comme différence majeure, c’est que dans le milieu communautaire, on a un manque de ressources humaines, mais aussi financières, pour avoir le temps et le luxe de mener des projets. Et on est toujours dans cette course justement, parce que nos besoins sont différents, alors que là où va l’argent dans les projets de recherche, les fonds sont souvent dans les universités.

FHK : Donc on comprend que ce projet répond à plusieurs besoins réels des personnes, enfin des femmes et des personnes non-binaires racisées. Tu parlais Alexandra aussi d’injustices épistémiques, donc est-ce que... je sais que c’est un peu, au cœur un petit peu de votre réflexion aussi, est-ce que vous pouvez revenir là-dessus, qu’est-ce que ça veut dire injustice épistémique ?

ST : Oui je peux peut-être lancer la première réflexion. À la base c’est un concept qui a été fondé par une philosophe américaine, Miranda Fricker, mais il faut le rappeler chaque fois, c’est un concept qui pose problème, parce que à la base, ça recoupe la question de la mise sous silence, de l’invisibilisation des voix, des expériences des contributions, des personnes en fonction de leur groupe social, et toute cette question de la mise sous silence elle a été développée bien avant Miranda Fricker par des chercheuses et des activistes noires. Par la suite, des chercheurs et activistes racisés, décoloniales, etc. Mais donc, bon, c’est un point important à faire avant. Mais donc, le concept d’injustice épistémique, ou de violence épistémique, cette idée de comprendre que c’est des situations dans lesquelles les témoignages des personnes ne sont pas suffisamment crûs ou suffisamment comprises, en fonction des biais que l’on a, parce qu’on les associe à un groupe social particulier, qui n’est pas dominant dans la société. Donc les femmes, les personnes racisées, les minorités sexuelles, etc, sont des personnes qui vont subir des injustices épistémiques au sein de la société, et nous on s’intéressait dans le milieu de la recherche, plus particulièrement, comment ça se matérialise.

FHK : Et dans le milieu de la recherche partenariale, comment ça se matérialise justement, est-ce que c’est des enjeux spécifiques ?

FC : Ben je pense qu’il y a peut-être deux aspects, surtout spécifiquement à PARR. Donc premièrement, de qui on parle, de femmes, de femmes racisées ou de personnes non-binaires racisées. Donc comme l’a dit Saaz, puisque ce sont des populations marginalisées, elles ont tendance à être plutôt victimes d’injustices épistémiques. Le fait aussi qu’on parle de recherche partenariale, ça unit deux mondes dans lesquels il existe beaucoup d’enjeux de pouvoir, donc le communautaire et l’universitaire. Donc même à ce niveau-là, à quel point les voix du communautaire sont entendues par le milieu universitaire, qui a plus de ressources comme Saaz le disait plus tôt. Donc il y a peut-être ces deux tableaux-là dans lesquels on peut voir les injustices épistémiques vraiment, vraiment marquées.

FHK : Plus marquées dans le milieu communautaire ?

FC : En fait, c’est ça, selon notre recherche, depuis les résultats qu’on a eus, c’est, les témoignages des milieux communautaires mentionnaient à plusieurs reprises la sensation de pas vraiment être compris par le milieu universitaire, de pas vraiment être entendus. Plusieurs enjeux rentrent là-dedans, des enjeux de langue par exemple. Donc si la communauté à laquelle on tente de parler parle anglais, mais que l’université à laquelle est associée le projet parle français, comment on fait pour se comprendre ? Pas toutes les universités ou tous les projets vont faire l’effort d’essayer de comprendre vraiment ce qui est communiqué par le monde communautaire. L’importance du communautaire dans le projet de recherche aussi. Est-ce qu’on fait juste prendre ce qu’on a besoin, donc des tendances extractivistes de l’universitaire, prendre ce dont on a besoin puis après bye le communautaire on a eu ce qu’on veut, ou est-ce que c’est vraiment un partenariat les deux ensemble ? Donc je dirais qu’il y a eu beaucoup d’enjeux à ce niveau-là qui sont sortis.

17:09
FHK : Ok merci. Tu voulais ajouter quelque chose Alexandra ?

AP : Non, ben c’était plus sur la genèse ou le départ...

FHK : Oui oui.

AP : ...du projet. Ce qui est intéressant je trouve, c’est...Souvent dans les projets de recherche, c’est de partir d’une hypothèse puis après de se les faire valider ou pas. Mais c’est sûr que au départ, quand j’ai voulu développer ce projet-là, c’est aussi parce que je parlais à d’autres chercheuses, des personnes non-binaires en recherche qui me disaient, qui exprimaient un peu des résultats de la recherche, mais au départ c’était aussi cette perception, ce sentiment d’avoir que ton savoir, tes connaissances, comment tu formules les choses, sont perçues de façon défavorable, mais sont aussi souvent repris et récupérées et je trouve que ça faisait un lien avec Miranda, je sais même plus… Miranda Fricker ? Qui, qui met en place, qui développe ce concept d’injustice épistémique, mais qui, je sais pas trop c’était quoi son approche, si elle a donné du crédit ou pas, mais qui a utilisé finalement les connaissances, le savoir de femmes noires, pour pouvoir développer ses propres connaissances puis son aura aussi, et je trouve que c’est un peu en miroir avec ce que, en tout cas, j’entendais, et qui m’a donné envie de développer le projet.

FHK : Merci, et donc, sur les, je comprends ce que tu dis Félicia sur les enjeux entre le milieu communautaire et universitaire. Est-ce qu’il y a des enjeux juste propres en recherche partenariale, pardon, sur les injustices épistémiques. Donc, moins en comparaison, mais plus spécifiquement sur la recherche partenariale.

FC : Ben en fait, c’est ça, je fais la comparaison parce que c’est beaucoup ce partenariat-là qu’on a analysé dans le projet. Mais je te dirais peut-être quelque chose que je n’ai pas nommé plus tôt, qui est en lien avec les publications, qui participe à publier et qui participe à écrire ce qui va sortir de la recherche, c’est aussi un enjeu qui est très propre au milieu de la recherche partenariale, juste parce qu’on est beaucoup de partenaires différents dans beaucoup de milieux différents. Si toute la portion d’écriture se fait à l’université, à quel point est-ce que nous, dans le milieu communautaire par exemple, on à notre mot à dire sur ce qui va dedans, on participe à comment les choses sont formulées. Donc ça c’est peut-être un enjeu que je n’ai pas nommé, Saaz je ne sais pas si...

ST : L’un des enjeux qui ressort beaucoup de...et qui me semble a été au cœur de la recherche partenariale entre les milieux communautaires et universitaires, c’est toute la question de la relation et de comment prendre le temps de construire des relations entre nous et entre les personnes qui font la recherche, les personnes qui sont les sujets de la recherche. Et donc, ça c’est quelque chose qui est beaucoup ressorti comme quelque chose de problématique qui réalimente ce décalage entre le milieu universitaire et le milieu communautaire, parce que justement, vu ce qu’on disait tout à l’heure, vu la temporalité qui est différente, à l’université on a des échéances très serrées. Donc ça pose un enjeu quand il faut aller étudier des réalités de populations qui ne nous sont pas familières; et donc il y a cette dénonciation en tout cas, ce reproche que l’on fait aux chercheurs universitaires, qui ne prennent pas le temps de construire des relations. Et donc ça reproduit ce genre de pratiques d’instrumentalisation, de venir prendre le savoir, puis une fois que la recherche est terminée, il n’y a pas de suivi, il n’y a pas de retour, y’a pas de vraie relation à long-terme qui est construite.

AP : Un truc à mon avis qui est spécifique à la recherche partenariale quand on parle d’injustices épistémiques, c’est le décalage entre les intentions et la réalité. C’est-à-dire que la recherche partenariale, c’est supposé être une recherche en partenariat, plus horizontale, en lien très proche en tout cas des réalités des groupes au Québec, des groupes communautaires, qui sont, qui devraient, qui sont, qui prétendent être dans le par/pour/avec. Donc, quand on parle de recherche partenariale et qu’on réfléchit aux injustices épistémiques, on se rend compte que ce par/pour/avec et cette idée de partenariat horizontal pose un problème, notamment pour les femmes et les personnes non-binaires racisées, parce qu’elles sont, parce qu’on n’est pas dans le par/pour/avec, clairement.

22:15
FHK : Merci beaucoup. Pour continuer justement sur la mise en place de ce projet, quels étaient les obstacles finalement que vous avez rencontrés au moment où vous avez commencé donc à réfléchir et à mettre en œuvre les premières étapes ?

AP : Euh ben les obstacles, c’étaient plus des défis disons. C’est clair qu’il y a eu un défi de, de...autour de la réflexion, donc la place des personnes autochtones. Est-ce qu’on avait la légitimité ou pas de les inclure dans l’échantillon qu’on voulait, avec lequel on voulait travailler. Ça on a beaucoup réfléchi à ça, avec toutes sortes d’allers-retours, donc on a plutôt décidé de travailler, d’essayer de développer des relations avec eux, de travailler s’ils voulaient bien, et si ça fait partie de leurs priorités parce que ça aussi c’est un enjeu, de travailler avec des personnes et des groupes plutôt que de les inclure complètement dans l’échantillon, ça c’était un des défis et l’une des réflexions qui était un peu en continu. Un autre des défis, ça a été la place de ce projet-là au sein de Relais-Femmes. Relais-Femmes c’est une organisation féministe majoritairement blanche, donc dès le départ l’idée c’était de dire, on fait ce projet-là, idéalement, tout le monde, je pense que tout le monde autour de la table était d’accord pour dire qu’idéalement, ce projet ne devrait pas être à Relais-Femmes. Mais compte tenu des écarts de ressources entre les groupes minorisés et les groupes majoritaires, on est dans cette situation-là donc comment peut-on profiter d’un travail d’alliés, donc tout ça. Après concrètement, donc l’idée c’était que le projet soit autonome, au sein de Relais. Mais après concrètement dans la vraie vie, notamment quand on parle de ressources financières, notamment quand on parle de bras de coudes, de genre de travail, ben ça se complique assez rapidement, cette notion...voilà, c’était un défi.

FHK : Au sein du projet aussi, vous avez choisi un public cible, donc les femmes et les personnes non-binaires noires et racisées. Donc pourquoi vous avez fait ce choix-là, et est-ce que c’était important de penser à un projet par et pour les personnes noires non-binaires et racisées, est-ce que vous pouvez expliquer la démarche.

AP : Au départ l’idée c’était vraiment de travailler sur le croisement genre et race. Donc voilà, c’est assez simple comme réponse, voilà, donc ça incluait la question des femmes cisgenres, mais aussi du genre plus largement. Donc on voulait inclure les personnes non-binaires là-dedans.

25:36
FHK : Une des conditions aussi du projet c’était de composer l’équipe du projet PARR par des personnes non-binaires et des femmes racisées et noires. Est-ce que vous pouvez expliquer aussi cette démarche.

AP : Je vais tenter quelque chose et après je relancerais mes collègues. Mais oui, l’idée c’était vraiment d’être un par/pour/avec, un projet par/pour/avec, donc toutes les étapes, le comité aviseur, les différents comités...les différents comités éthiques, tout le projet donc on voulait mettre au centre ces personnes-là. Après, toute la question des personnes non-binaires tout le long du processus, on n’a pas nécessairement réussi à avoir dans chacun des comités ou à chaque étape, mais c’était vraiment le souhait.

FC : Je rajouterais à ça aussi que ça fait partie des questionnements en fait en printemps 2022. Donc déjà les femmes racisées et noires en recherche partenariale c’est très niché, là on rajoutait les personnes non-binaires aussi, puis tsé, on n’était pas une équipe de personnes, où il y avait des personnes non-binaires même dans le comité de démarrage ou aviseur initial, il n’y avait pas de personnes non-binaires, donc on avait le questionnement de : est-ce qu’on va être capable d’avoir assez de personnes non-binaires dans le projet pour même dire qu’on les a inclues ? Est-ce qu’on ne répète pas ce qu’on tente de dénoncer en termes de tokenisation et tout ça, donc ça aussi fait partie des questionnements au début. Puis ce qu’on s’est dit, c’est qu’on se lance, on essaie, et s’il n’y en a pas qui participent, ça va être l’une des limites de notre recherche. Mais ça fait partie définitivement des questionnements quand on dit qu’on est par pour et avec, puis qu’il y a un groupe qu’on ne voit pas nécessairement, définitivement ça fait partie des conversations au tout début.

FHK : Et aussi je voulais passer sur l’étape plutôt, la réflexion, les premières étapes de mise en œuvre, ma prochaine question ça serait aussi sur le fait que vous avez mené votre recherche au sein d’un organisme communautaire, en dehors de toute instance universitaire, donc j’aimerais bien aussi vous écouter sur ce pourquoi ce choix-là, finalement.

FC : Je peux peut-être commencer, peut-être qu’Alex tu peux poursuivre. En fait je pense que la conversation là-dessus, quand j’ai fait partie de l’équipe, ça a vraiment commencé quand on a parlé de toute la question éthique. Je sais qu’on va y revenir plus tard, mais dans notre comité aviseur, on a beaucoup, ben on avait 2-3 membres je pense de l’universitaire, qui elles se proposaient pour qu’on puisse tenter de passer un processus éthique universitaire, puis on s’est beaucoup questionnées là-dessus aussi, d’essayer de garder notre idée de base, et notre mission de base, et de pas trop voir ça affecté par des biais universitaires par exemple qu’on ne contrôle pas. Puis aussi, si c’est l’équipe PARR qui mène le projet, mais que c’est...je sais pas, l’université, l’UQAM par exemple qui nous pose des restrictions éthiques ou quoi que ce soit, à quel point est-ce qu’on est capable de rester indépendants. Donc la question de l’indépendance tout le long du projet, je sais que c’est quelque chose qui est beaucoup resté. On a parlé des injustices épistémiques plus tôt aussi, donc il y a cet enjeu-là aussi, donc nous, on est dans une organisation communautaire, on a une vision. Si on rentre l’universitaire là-dedans aussi, à quel point est-ce qu’on va être capables de garder cette vision-là. Donc ça a fait partie des conversations au début.

29:24
AP : Complètement. C’était une question d’autonomie, mais aussi, comme tu dis, d’injustice épistémique, dans le sens pourquoi est-ce qu’il faudrait qu’on se soumette, à notamment sur la question éthique, à un processus universitaire qui va juger de la valeur des savoirs, des connaissances, qu’on met en avant, des pratiques. Donc pour nous c’était important d’essayer, c’était pas évident, d’essayer de tenter autre chose, d’avoir une vraie préoccupation éthique, mais d’essayer de faire en sorte qu’elle soit plus proche des milieux, c’est-à-dire des milieux communautaires et féministes qu’on connaissait, et qui ont démontré à plusieurs reprises être capable de faire de la recherche, même si les pratiques et probablement les finalités sont différentes du milieu universitaire plus classique.

FHK : Donc vous parlez de la question de l’indépendance et de l’autonomie notamment sur la question éthique, est-ce que vous pouvez revenir là-dessus un peu plus précisément, comment vous avez développé votre réflexion éthique dans le cadre du projet PARR ?

FC : Ouais ben je peux peut-être commencer. On se questionnait déjà sur l’éthique, c’est ça, en printemps 2022. Par la suite, on a eu notre première récolte de données si tu veux. On a eu un comité ad-hoc en début juin, auquel on a posé des questions en fait sur l’éthique. Donc eux, qu’est-ce qu’ils en pensaient, qu’est-ce qu’on devrait...Est-ce qu’on devrait plutôt se tourner vers l’universitaire parce que justement, dans le comité aviseur, on avait beaucoup de suggestions vers ça, ou est-ce qu’on devrait créer quelque chose nous-mêmes. Les participantes du comité ad-hoc étaient super emballées à l’idée qu’on crée quelque chose nous-mêmes, mais c’est sûr qu’il y avait aussi le temps. Donc on l’a nommé tantôt, avec la COVID, le projet a dû...a commencé plus tard que prévu. Donc il y avait cet enjeu-là aussi, de comment on fait pour rentrer un comité éthique alors que le plan c’était comme qu’en juillet, on commence les entrevues. Ça ne laisse pas beaucoup de temps, un mois, pour essayer de tout planifier un cadre éthique, de passer une évaluation éthique, de créer un comité éthique, puis voilà, finalement on a quand même décidé de se lancer là-dedans. Je sais pas si Maud veux-tu élaborer...

31:46
MJB : Donc l’idée qu’on avait aussi pour avoir un comité éthique communautaire en dehors de l’universitaire, c’est que comme on avait un projet par/pour/avec, il y a deux choses. C’est que la première chose, c’est que en étant des personnes qui appartiennent à la communauté étudiée, on a aussi accès à certains réseaux qu’on souhaitait, qui parfois, dans les évaluations éthiques universitaires, peuvent être vus comme un biais beaucoup trop important pour que ça soit une recherche scientifique ou whatever, donc il y avait cette chose-là. Puis il y avait aussi le fait que l’évaluation des universités, enfin, des comités éthiques universitaires, se centrent énormément sur la protection des individus, mais quand on est dans du par/pour/avec des communautés racisées, il faut aussi prendre la communauté racisée dans son entièreté, parce que ben c’est ça, quand il y a des risques, en fait quand il y a des....comme ils appellent ça dans les évaluations éthiques universitaires, les risques qui sont encourus individuellement ne sont pas qu’individuels. Il y a aussi un comité qui peut en pâtir, surtout quand elle est déjà marginalisée au niveau de la société. Donc c’est ça.

FHK : Super intéressant sur aussi votre réflexion sur le comité éthique finalement indépendant. Comment s’est inscrit aussi votre recherche au sein du paysage de la recherche partenariale; est-ce qu’il y a beaucoup de recherches qui se font comme ça par/pour/avec ? Comment, ou est-ce que vous vous situez ?

AP : Moi je pense que c’est groundbreaking *rires*, mais je suis complètement objective. *rires*

ST : Non ben c’est ça, c’est qu’il n’y a pas encore assez de travaux qui adoptent ce genre d’approches et qui se concentrent sur ces sujets de recherche là. Et c’est ça, je pense qu’au cœur de cette approche méthodologique, c’est vraiment le but derrière, ou en tout cas l’objectif visé, c’est de voir le monde social, voir les sujets qui nous entourent un peu avec humilité. Et de se dire que les expériences, les réalités auxquelles on a accès dans la vie, c’est celles-là qu’on devrait en principe être capables de … enfin, sur lesquelles on devrait être capables de travailler, avec lesquelles on devrait être capables de faire des collaborations, voilà.

MJB : Aussi ce qu’il faut préciser, c’est que la recherche partenariale, ou la recherche par pour avec, n’a pas commencé avec nous. C’est juste que je pense qu’à l’heure actuelle, avec aussi la renommée de Relais-Femmes, ça change le fait de pouvoir aussi avoir une visibilité sur cette recherche-là. Donc, et puis parce que de un, on a la visibilité de Relais-Femmes qui fait que la recherche a aussi des canaux de diffusions vraiment plus large, mais aussi la subvention en tant que telle. Je suis persuadée qu’il y a eu d’autres recherches qui soient dans ce genre-là etc., mais qui n’a pas forcément eu la subvention, ou l’argent ou la visibilité pour pouvoir aussi faire valoir cette recherche-là. Donc c’est ça, c’est aussi de pouvoir mettre ça de l’avant, et de pas...On ne pense pas aussi qu’on a tout inventé et qu’on est le premier projet à faire ça, mais c’est aussi important de le préciser.

35:08
**musique**

35:16
FHK : On se retrouve pour la seconde partie de notre podcast avec Alexandra, Félicia, Maud et Ornella. Donc on va plus parler sur le volet plutôt action communautaire au communautaire. Tout au long de la mise en action du projet, plusieurs activités communautaires ont eu lieu. Est-ce que vous pouvez revenir finalement sur chaque activité, Félicia a glissé un mot au début, est-ce que tu peux revenir là-dessus plus précisément.

OT : Oui bien sûr. Donc il y avait la portion recherche, qui était importante, mais au-delà de ça il y avait aussi cette question de rendre tangible, quelque part, tout ce qui avait été récolté comme résultat, mais aussi de le diffuser. C’est comme ça qu’on a pensé à organiser tout d’abord un forum de trois jours. En avril 2023. On a d’abord commencé par une conférence avec Marie DaSylva, on a eu cette idée en assistant à un événement de Harambec, le collectif Harambec, avant que ça s’appelle le collectif Harambec. On était à une conférence anti-conférence animée par Marie DaSylva, et Maud et moi on s’est regardées puis on a dit c’est ça qu’on veut, c’est ça dont on avait besoin, parce que le format permettait à beaucoup de gens de partager d’échanger, mais il y avait aussi ce truc d’entendre les témoignage des autres et de se dire « ah! Mais, c’est ce que j’ai vécu ». D’entendre des solutions proposées à d’autres personnes et de se rendre compte qu’il y a une bonne partie qui peut s’appliquer à nous-même, nos problématiques. Marie DaSylva, elle est la fondatrice de l’agence Nkaliworks qui est une agence qui se spécialise à accompagner les femmes racisées dans le milieu professionnel. En gros, tout ce qui est syndrome de l’imposteur, difficultés à s’affirmer et à reconnaître sa valeur, elle travaille beaucoup dessus. Personnellement, c’est quelqu’un qui m’avait été référée lors de mon premier burn-out, en 2016, et à qui j’avais pas eu accès parce qu’elle était en France. Donc nous on trouvait que ce n’était pas une mauvaise idée de continuer à rendre sa présence accessible au Québec, surtout quand on parle de personnes, de femmes et de personnes binaires non-racisées dans le milieu de la recherche partenariale, dont le vécu, dont les obstacles, dont les défis sont pas forcément rendus visibles. Voilà, sa présence était plus qu’importante. On lui a parlé, elle était d’accord, on était très contentes! Et c’est comme ça qu’on a commencé, enfin continuer à planifier le forum.

Elle a non seulement animé la conférence, qui elle était ouverte à toutes les personnes racisées, tout genre confondu, qui faisaient de la recherche partenariale au Québec. Puis on a aussi offert deux journées d’ateliers, avec elle toujours, mais également avec d’autres activités. On a pensé à l’art-thérapie, parce que on demande à toutes les personnes qui ont participé au forum de venir s’ouvrir en fait, quelque part. De venir co créer des espaces de partage, des communautés de pratique, mais avant ça il faut se sentir assez à l’aise pour baisser assez ses gardes, pour pouvoir se livrer un tout petit peu et pour pouvoir écouter ce qui se passe autour de nous. Et c’est comme ça qu’on a conçu le forum. Donc comment est-ce qu’on peut faire en sorte pour que les gens soient assez en sécurité, que les gens se sentent assez soutenus, assez écoutés, et assez valorisés aussi. Que leur vécu soit pris en considération, et que des solutions concrètes et tangibles soient offertes.

On a parlé de rapports de pouvoir, on a parlé d’expériences, on a aussi surtout parlé de cocréation et de mettre en commun des stratégies. On a offert toutes sortes d’activités hein, l’art-thérapie, les ateliers, la sonothérapie aussi, on a aussi pensé au côté fun, avec une DJ, pour qu’on puisse tsé se libérer physiquement aussi. Et tout ça c’était bien beau pour la conférence, et pour les ateliers donc pour le forum, mais il y a tellement de stratégies qui ont été récoltées dans la recherche, qui a été faite par Saaz et Félicia. Dans le forum également, on s’est dit ben, il y a des sujets, il y a des thèmes qui sont ressortis, comme la tokénisation, ou comme également, comment est-ce qu’on s’assure de faire ou de participer à une bonne recherche partenariale. Ce qui nous a donné l’idée de créer une cohorte PARR, une cohorte de participants du forum, qu’on allait pouvoir continuer à accompagner. Et cette cohorte PARR, on a proposé deux journées d’atelier à l’automne 2023, pour un : s’adresser aux enjeux et aux réalités de la tokénisation, et d’une autre part, s’adresser aux bonnes pratiques en recherche partenariale, avec des stratégies très concrètes qui étaient bien sûr co créées, mais qui étaient aussi assistées. Donc c’étaient des personnes qui étaient accompagnées par des personnes, des gens, qui étaient...j’aime pas le mot expert, mais qui s’y connaissaient dans ces thèmes-là. On a voulu offrir des solutions pratiques comme comment écrire une entente de propriété intellectuelle qui me ressemble, comment entre guillemets tirer profit de la tokenisation, comment ne pas trop l’internaliser, faut pas que ça nous écrase, mais on s’entend que parfois c’est des situations qui sont difficiles à éviter, surtout quand on parle de tokenisation, donc d’accepter que ben c’est des choses qui vont arriver...Mais comment je me protège, comment je protège ma communauté, comment est-ce que je peux m’en servir.

Donc voilà un peu les ateliers qui ont été offerts. Et puis il fallait également partager les résultats de la recherche à d’autres communautés BIPOC, et aux communautés autochtones, et proposer un espace où ces communautés pouvaient partager leurs stratégies. Parce qu’il y a les stratégies individuelles, il y a les stratégies communautaires, mais entre communautés, c’est sûr que ça peut être pratique de partager ces stratégies, et c’est comme ça qu’on a créé les journées BIPOC, dont la dernière s’est terminée cette semaine, d’ailleurs. C’est toute une journée de présentation de résultats, de panels et d’ateliers, pour co-créer et partager des stratégies et des vécus. Donc on insiste beaucoup sur la possibilité de proposer des espaces sécuritaires, non-mixtes, de réflexion et de partage. Voilà.

41:51
FC : Je rajouterais peut-être à ça aussi, j’aime ce qu’Ornella dit pour des solutions concrètes et des stratégies concrètes. Quelque chose qui était beaucoup revenu des participants de la recherche, comme on l’a mentionné tantôt, c’est « ah tsé, on participe à un projet, puis après ça on en entend plus jamais parler ». Ben le forum, les journées BIPOC, les journées cohortes, ça été toutes des événements où on a croisé des gens qui ont participé aux entrevues, au premier comité consultatif ad-hoc, aux focus groups…Donc ça été cool aussi pour les participants de concrètement voir leurs critiques répondues, de pouvoir avoir accès à ces suites-là d’un projet comme le projet PARR.

OT : Il y a un événement dont je voudrais parler qui s’en vient pour le printemps 2024. Donc là ça été beaucoup des communautés entre guillemets de travail, de validation entre communautés et de travail, mais on pense aussi que c’est important de se reposer ensemble et de ressourcer ensemble, de pas seulement se retrouver pour se plaindre, dit grossièrement comme ça, mais aussi de se retrouver pour partager de bons souvenirs, et dans cette optique on organise une retraite en printemps 2024 où on ne va pas travailler. On va relaxer, on va chiller, on va se reposer, on va se reconnaître, et on va reconnaître que c’est important qu’on se repose, c’est important qu’on se pose en fait, puisque se reposer c’est important qu’on se pose aussi en communauté.

FHK : Sans objectif de productivité.

OT : Sans objectif de productivité, exactement.

43:23
FHK : Ok c’est super intéressant. Donc sur le volet recherche puis sur le volet action communautaire, il y a eu aussi plusieurs projets qui se sont mis en place, notamment sur la diffusion de la connaissance. Notamment la mise en place d’un deck pour réunir les stratégies de résistance qui ont été collectées pendant les activités dont tu parles Ornella. Est-ce que vous pouvez me parler finalement de ce projet du deck.

MJB : Euh oui, alors déjà on appelle ça deck parce qu’apparemment c’est connu ici. Mais en gros, c’est comme un jeu de cartes, d’apprentissage, d’auto-apprentissage sur des thématiques. Souvent c’est des choses liées à la méditation, au self-care, whatever et là on s’est dit, ça serait aussi nice de l’adapter et de le rendre pratique pour la population cible qu’on a depuis le début. Et en fait, voyant toutes les stratégies au forum, voyant...c’est ça, il y avait toujours...comment dire, une espèce de faim, mais faim f-a-i-m, *rires* de faim pour toujours comme plus, parce que c’est des espaces que, c’est ça, on a pas l’habitude d’avoir, que voilà, c’est vraiment un besoin. Donc on s’est dit, ce qu’on va faire, c’est grâce à la cohorte, et puis le forum, on va avoir aussi des, comment dire, des axes vraiment précis de situation qu’on aimerait pouvoir collecter et mettre dans un outil pratique pour que la personne qui se retrouve dans une situation puisse tirer des cartes, bon, tirer des cartes, pas comme voilà, mais tirer des cartes dans le sens ou dans le deck, ça va être rangé vraiment par thématique. Donc tokenisation, prendre soin de soi, etc. Et puis bien c’est ça, si moi, Maud Jean-Baptiste, je me retrouve dans des situations de tokenisation, je peux prendre ce deck-là, aller dans le chapitre, et voir toutes les stratégies qui ont été partagées à la fois dans le forum, à la fois dans les journées cohortes, à la fois dans les journées BIPOC, à la fois dans la recherche de Saaz et Félicia, voir ce qui est possible de faire au niveau individuel, voir ce qui est possible de faire au niveau communautaire et même maintenant intercommunautaire vu qu’on a aussi eu nos journées BIPOC.

OT : Non mais c’est ça, l’idée c’est d’avoir un outil qui est accessible. Parce qu’un deck de cartes, oui c’est tirer, c’est pas tirer des cartes comme au tarot, mais c’est fortement inspiré de ça aussi, c’est que il y a tellement de stratégies qui ont été partagées, je sais, on sait que les gens ne vont pas se souvenir exactement de tout ce qui a été dit, même si elles ont été présentes, même si elles ont assisté, même si elles savent. Ça arrive à tout le monde de figer, tsé dans des situations où par exemple de tokenisation, ça peut arriver qu’on fige. Mais de savoir qu’on a un outil comme ça à portée de main et qu’on respire un tout petit peu et que *floup*! On peut dégainer une carte, lire, se rappeler, et rentrer en action. Tsé, ça peut être pratique comme ça aussi. L’idée c’est de rendre aussi tout ce que nous on a récolté comme stratégies, c’est de rendre la diffusion du savoir accessible. Et c’est à travers un deck de cartes qu’on va faire ça aussi.

MJB : Et puis aussi le deck de cartes va être remis, parce qu’encore une fois, dans cette dynamique de redonner aux personnes qui ont pris de leur temps, qui ont pris de leur énergie pour faire des témoignages, pour aussi participer aux activités de co-construction etc., de pouvoir leur remettre au dernier événement en fait en mars 2024, de remettre à cet événement-là, la version papier, même si on pense, on espère en tout cas, avoir la version numérique aussi disponible en ligne, que ce soit bref...peu importe où est-ce que ça va être diffusé. Mais en tout cas, ce sera disponible en ligne pour aussi d’autres personnes, soit qui sont en recherche tout simplement, pas recherche partenariale, toujours des personnes racisées qui ont...Parce que ces stratégies-là ne sont pas juste propre aux...Parce que c’est aussi le, le, comment dire, bénéfice d’un projet comme ça, c’est que c’est pas propre vraiment que aux personnes non-binaires, femmes racisées en recherche partenariale, c’est aussi valable pour les travailleuses communautaires, c’est aussi valable pour des personnes à l’université, des professeurs, peu importe-là. Mais c’est sûr que c’est à destination, dans tous les cas, de personnes racisées.

FHK : Puis il y a aussi un autre projet, donc on est en plein dedans, le podcast. Pourquoi c’était important pour vous d’utiliser ce canal de diffusion ou il y a le son, mais aussi la vidéo ?

MJB : Ben, c’est ça, c’est que le podcast, encore une fois, parce que souvent dans les projets comme ça, il y a toujours une dimension d’évaluation dans, c’est ça, d’évaluation qui, souvent par écrit, remis au financeur, on s’est dit que ça peut être une bonne occasion, donc même si le premier épisode est un peu différent des autres épisodes parce qu’il fallait quand même rentrer dans pourquoi le projet, pourquoi ce podcast, etc... Donc ça c’est ça, mais le reste des épisodes va vraiment être sur le retour des personnes qui ont participé à nos événements, donc que ce soit le forum, que ce soit les journées cohorte, les journées BIPOC. Sur leur expérience, mais par thématique donc à savoir, je donne vraiment des exemples comme ça, je ne les ai pas tous en tête, mais quels sont, quel a été par exemple, en fait pourquoi ça est important pour elles d’être dans un espace non-mixte pour pouvoir partager des expériences de violence dans des milieux X ou Y. Aussi quels ponts de solidarité on peut avoir à la fois entre personnes noires et racisées, mais aussi entre personnes noires, racisées, autochtones, parce que c’est ça, on a eu aussi nos journées BIPOC, donc c’est ça. De pouvoir aussi rendre ça vivant, de ne pas juste avoir ça à destination d’un financeur, mais aussi que les personnes du milieu, donc encore une fois, je vais pas le répéter je pense parce qu’à la fin tout le monde va savoir qu’on dit « femmes et personnes non-binaires racisées dans le milieu de la recherche partenariale, c’est ça le public cible ».

Puis aussi avoir accès à ça, avoir accès à des personnes qui ont vécu le projet, parce qu’encore une fois, le projet PARR, c’est pas que de la recherche, c’est aussi, une grosse partie c’est de l’organisation communautaire. Donc aussi que les efforts que nous ont a mis en terme d’organisation communautaire puissent être vécus dans l’expérience des personnes qui ont participé, pour qu’on puisse, c’est ça, avoir leur expérience là-dessus, puis pourquoi pas, c’est ça, des pistes de réflexion aussi plus collectives pour d’autres sortes de projets, parce qu’encore une fois, c’est pas un seul projet. On ne vise pas à être genre la référence pour de la recherche partenariale avec des personnes racisées et bla-bla-bla. Il y a beaucoup de gens qui ont fait beaucoup de choses. Il y aura aussi beaucoup de choses après nous. Puis c’est aussi amener une petite pierre à l’édifice pour entraîner d’autres conversations.

Et puis je veux juste rajouter aussi, parce que c’est aussi de Sonia là, Sonia Alimi qui a aussi sur l’aspect du visuel, parce que le podcast ça aurait pu être juste audio. Mais on s’est encore dit qu’il n’y a pas beaucoup d’espaces où voir des personnes racisées, comme témoigner de leur travail, de leur expérience, de leur expertise, c’est des choses dont...C’est ça, il y a beaucoup d’obstacles pour nous à ce niveau-là, donc aussi de pouvoir personnifier par le visuel, par le fait de filmer le podcast, c’est aussi de rendre vivant aussi nos expériences et c’est ça. Donc je redonne à Sonia ce qui est à Sonia.
FHK : Merci à Sonia Alimi. Et oui de mettre en visibilité finalement votre travail aussi, qui a l’air…Enfin vous travaillez dur depuis le début du projet, félicitations à vous toutes.

L’équipe PARR : Merci.

51:32
FHK : Merci à toutes et à tous d’avoir suivi cet épisode. Merci aussi à nos invitées pour ce bel échange, et je parle aussi au nom de l’équipe du projet PARR qui tenait à remercier toutes les personnes collaboratrices du projet, sans qui ce podcast n’aurait pas pu voir le jour. À chaque étape des activités du projet PARR, elles ont fait un travail remarquable pour soutenir et apporter leurs expériences et expertises à un nombre significatif de femmes et de personnes non-binaires autochtones, noires et racisées. Quant à nous, on se retrouve dans un prochain épisode, à très bientôt.

**musique**

FIN

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